La robotique à l'école est-elle le garant de la construction d'une éducation au numérique ?
Olivier Grugier  1@  
1 : Grugier
Laboratoire EDA

Depuis 1985 avec la présentation du Plan Informatique pour Tous et en faisant suite aux travaux de Papert (1980), des robots programmables de sol pilotés ont été introduits dans des classes. Ce plan politicoscientifique amorcé dès les années 70 avec des recherches exploratoires en éducation traduit une volonté institutionnelle d'équiper de nombreux établissements scolaires par l'État. Après l'expérience LOGO plusieurs fournisseurs de matériel vont développer des robots de plancher avec des présentations et des caractéristiques variées. Les premiers robots diffusés se présentent sous la forme d'un dôme transparent, il s'agira de la tortue. Quatre décennies plus tard avec le retour d'un enseignement au numérique dans les programmes de l'école (2015) et la miniaturisation des composants électroniques, de nouveaux robots vont être proposés par les fournisseurs. L'enquête que nous avons menée en 2020, auprès des onze fournisseurs de matériel destinés à équiper les écoles en France, révèle que les deux robots les plus commercialisés sont le BeeBot et le BlueBot. Ils représentent 90% des ventes. Ces robots, comme les véhicules de Braienberg (1984) et la tortue de chez Jeulin, utilisent les mêmes actionneurs, deux roues motrices, permettant de générer le déplacement.

Cependant, la présence de ces robots dans la classe, plébiscités depuis le début de l'introduction d'un enseignement de l'informatique, est-elle la garantie de la construction d'une éducation au numérique ?

En partant de l'approche historique de l'enseignement de l'informatique et du numérique (Baron, 2018) dans les écoles françaises, l'enseignement de l'informatique et du numérique scolaire peut se caractériser en quatre pôles (Grugier, 2023). Le premier est celui des objets et des systèmes. Le second est lié à la pensée informatique. Cette pensée peut se définir comme une réflexion logique qui anticipe dans un ordre précis plusieurs actions. Le troisième pôle est celui du codage et du langage qui sont en étroite relation avec les objets. Et le dernier pôle est celui de la communication et de la diffusion de l'information qui est historiquement le premier qui a été introduit dans les écoles avec la télévision scolaire. Ce cadre permet d'interroger et les moments scolaires mis en place dans des classes ordinaires avec les robots BeeBot et BlueBot.

Cette communication s'appuie sur des données issues du projet de recherche ANR IE CARE (2018-2023). Des observations de séquences ont été menées dans six classes entre le mois d'octobre et le mois de novembre, entre 2017 et 2022. Les séquences ont été filmées puis analysées. Un questionnaire a été diffusé auprès d'enseignants des écoles et 64 réponses sont exploitables concernant les intentions de ces derniers sur l'usage de robot pour un enseignement au numérique.

 Les enseignants interrogés envisagent, majoritairement, l'usage de la robotique éducative comme un moyen de développer la notion de déplacement spatial. Alors qu'il est peu évoqué la possibilité de développer des notions de programmation ou de résolution de problème. L'analyse des pratiques dans les classes montre que les interventions des enseignants se focalisent prioritairement sur la finalité de l'activité en faisant en sorte que les robots se déplacent jusqu'à l'emplacement désiré. Encore une fois, le déplacement dans l'espace est au centre de la situation d'apprentissage. De plus, les supports qui sont développés par les enseignants pour aider les élèves à programmer les robots sont des itinéraires représentant les déplacements attendus des robots. Cette communication propose de discuter des enjeux didactiques au travers des moments scolaires envisagés et mis en œuvre par ces enseignants avec les robots les plus diffusés dans les écoles.


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